JNIM s’implante au Nigeria par sa collusion avec les bandits Lakurawa

Written on 21 novembre 2025
Le Mag


La frontière entre le Nigeria et le Bénin devient un point de friction où la ligne entre banditisme et jihadisme se resserre. Des responsables locaux et des observateurs décrivent une coopération entre Jamaat Nusrat al‑Islam wal‑Muslimin (JNIM) et des groupes armés nigérians qualifiés de « Lakurawa », au moment où des indices pointent vers une entrée opérationnelle de JNIM sur le territoire nigérian (article de Jacob Zenn, Jamestown).

Des leaders villageois affirment que les Lakurawa ont d’abord été invités pour lutter contre le banditisme, avant de se retourner contre leurs hôtes et d’adopter des éléments d’idéologie jihadiste. « Un groupe d’autodéfense devenu prédateur », résume un reportage d’Al Jazeera. Des responsables nigérians soutiennent que les Lakurawa ont des origines au Mali, ce qui éclairerait leurs liens transnationaux et leur coopération avec l’État islamique–Sahel (IS–SP) ou JNIM, ainsi que l’entrée de ces derniers au Nigeria.

Plusieurs événements récents alimentent cette hypothèse. Le 27 octobre, des Lakurawa ont tué dix éleveurs dans l’État de Kebbi, près de la frontière béninoise; Daily Trust a associé cet épisode au groupe. Un chercheur souligne qu’« il n’est pas clair si “Lakurawa” désigne un groupe cohérent ou un label générique », rappelant l’absence de porte‑parole et de revendications formelles, « à l’inverse de Boko Haram »; l’attribution reposerait souvent sur le modus operandi et des recoupements officiels.

JNIM, de son côté, a diffusé en juillet une vidéo montrant sept combattants affirmant se trouver au Nigeria, avec une trajectoire plausible de franchissement depuis le Bénin. « Les preuves visuelles les plus solides à ce jour d’une présence de JNIM au Nigeria », a commenté un observateur Brant Philip. Le 30 octobre, une attaque contre un poste militaire dans l’État de Kwara a été attribuée à JNIM par des suivis open‑source.

Cette dynamique s’inscrit dans une montée du banditisme qui « rivalise désormais avec le jihadisme en ampleur et en létalité » dans plusieurs régions nigérianes. Avant l’émergence des Lakurawa, les enlèvements massifs d’écoliers, les exécutions de civils et le détournement de trains de passagers avaient déjà installé une crise sécuritaire de premier plan. Comme lors de la montée en puissance de Boko Haram en 2012–2013, une explication avancée est que JNIM, et possiblement IS–SP, appuient des réseaux criminels locaux; ces groupes assistés par des jihadistes seraient ensuite désignés « Lakurawa » par les populations.

Des interactions impliquant Ansaru, mouvement local issu d’une scission pro‑al‑Qaïda, sont également évoquées, renforçant l’idée d’un maillage entre acteurs sahéliens et nigérians. À mesure que ces connexions s’affirment, la frontière Bénin–Nigeria « devient un foyer » des affaires sécuritaires nationales, avec un risque d’hybridation insurgée comparable à celle qui a déstabilisé le Mali, le Burkina Faso et le Bénin. La priorité pour les autorités est désormais de démêler le « label Lakurawa » — leadership, structures et chaînes logistiques — afin d’établir des responsabilités et de contrer des alliances qui, en l’absence de revendications claires, prospèrent dans l’ambiguïté.

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